L'enseignement social de l'Eglise étant une partie intégrante du message évangélique ne peut se laisser efficacement transmettre que si, à l'instar de la Parole de Dieu, il ne perd pas de vue ses destinataires qui sont des personnes concrètes, ayant leur rationalité culturelle propre. Or l'on constate qu'en Afrique noire le message social chrétien continue d'être proclamé sur base des concepts empruntés à une philosophie étrangère à la vision du monde des destinataires. En effet, les notions fondamentales telles que les concepts de personne, de nature, de liberté, de propriété, etc. demeurent sans grande pertinence pour le monde africain subsaharien. Ces questions se situent au coeur de la préoccupation de cet ouvrage. Il s'agit plus particulièrement de considérer le concept de la vie comme principe autour duquel pivote toute l'éthique africaine, sans chercher à recourir à la loi naturelle classique comme fondement. La vie au sens africain a une dimension fondamentalement relationnelle et elle est tridimensionnelle, embrassant le monde visible et invisible, à savoir, celui des vivants, des morts et des non-encore-nés qui, ensemble, forment une communauté intégrale. Dans cette communauté il y a une interaction de vie entre les membres, l'action de l'un fait grandir tous les autres et vice versa. On parle ainsi d'un engendrement et d'un enfantement mutuels. La présente étude plaide pour que dans l'enseignement social de l'Eglise en Afrique subsaharienne toutes les questions tiennent compte de cette rationalité et soient discutées dans le cadre de la vision et de la religiosité africaines.